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Le Journal de Miranda
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Le Journal de Miranda
19 décembre 2010

A reculons

Son corps me réchauffait. Je sentais à peine le froid pendant que je me collais à sa poitrine. Et nos anoraks crissaient tandis qu’il me gardait contre lui. Il avait passé ses bras dans mes dos, presque au niveau des reins, alors que je le tenais par la nuque. En fait, nous avions l’air de deux bonhommes de neige perdus sous une montagne de vêtements. Et, ensevelis sous les couches de laine, d’écharpes et de pulls, nous n’avions plus l’air très séduisant. Pourtant, nos baisers étaient toujours aussi passionnés -même si le pompon de mon bonnet dansait au sommet de ma tête. Nous ne nous laissions pas distraire par notre aspect. Même mon bout de nez rougi ou ses lèvres bleuies, un peu craquelées, ne rentraient pas en compte. D’ailleurs, certains promeneurs se retournaient sur nous, étonnés par notre proximité. Aucun couple n’avait le courage de s’embrasser, ni de s’étreindre au milieu d’une tempête de neige. Les gens accéléraient le pas pour rentrer chez eux, pressés de fuir le blizzard. Mais rien ne nous délogeait. En fait, rien ne nous troublait. Ou seulement l’autre. Le reste n’existait pas.

New-York avait disparu sous les couches glacées. Dans les rues, la circulation tournait au ralenti. Toutes les voitures s’enlisaient, projetant des gerbes blanches sur les trottoirs et les malheureux passants. Toutes les avenues étaient ponctuées de crissements de pneus, d’accidents de la route à cause des plaques de verglas. Surtout, le ciel n’avait jamais semblé aussi bas et sombre au-dessus des immeubles. On aurait dit qu’il faisait nuit. Pourtant, l’après-midi commençait tout juste alors que le soleil se cachait derrière des nuages ternes, chargés de flocons. En fait, toute la ville dormait sous une bulle de givre, en apesanteur. A chaque pas, on entendait la neige qui crissait sous les chaussures. On s’enfonçait jusqu’aux mollets dans la poudreuse. Et on respirait par la bouche, gênés par l’air tranchant comme du verre, vif comme une griffe. Malgré tout, j’aimais bien cette saison. Je persistais à la trouver romantique, naïve, un peu à côté de la plaque. Et alors que les badauds pestaient, comme les automobilistes qui noyaient leurs moteur, je me réjouissais. L’hiver me plaisait comme un paradis blanc.

Le goût d’Hannibal remplissait ma bouche. Il dilatait mes pupilles, rappelant une addiction. Et mes yeux de chatte brûlante se troublaient, étirés sous une frange de cils noirs. Nos lèvres se caressaient, nos nez se frôlaient. C’était un ballet que je connaissais. Et il chauffait mes veines jusqu’à ébullition, dissipant le froid qui me mangeait la peau. Dans notre monde, je tirais alors la fermeture éclair de ma parka. J’avais besoin de m’aérer, de respirer. C’était mon plein été. Et le petit zip glissa, révélant mon gros pull gris à col roulé. J’étais presque soudée à la poitrine de mon frère. Cela me protégeait. Mais parce qu’il faisait très froid, Hannibal tendit aussitôt la main vers ma taille. Et, sans cesse notre baiser, il remonta aussitôt la fermeture avec autorité. Il n’était pas question que je me découvre, que j’attrape froid. Et je retins un sourire, trop concentrée sur sa bouche, pour céder au rire. Il fallait dire que je n’étais pas très prudente. Je me croyais toujours en Australie. Et malgré la tempête, il m’arrivait encore de sortir sans manteau -même si Hannibal me rattrapait toujours sur le palier.

A mes yeux, Noël avait toujours été la fête du soleil, du sable et de la plage. J’avais connu plus de barbecues que de bûches glacées, plus de palmiers que de sapins. Et avec l’insouciance des enfants, je vivais encore mon été austral à l’autre bout du monde. Prisonnière de mon anorak, j’émis alors un petit bruit rauque -du mécontentement ! Et cette fois-ci, Hannibal étouffa un rire contre mes lèvres. J’étais toujours aussi espiègle et enfantine. Mais je ne le lassais pas. Et bientôt, sa main glissa dans mes cheveux, sous le bonnet, alors qu’il inclinait ma nuque en arrière. Nous étions assis sur un banc public au milieu de Central Park. Derrière nous, un grand saule aux branches nues pleuraient ses feuilles dans la neige. Toute sa chevelure s’effondrait comme une masse, un rideau. Et grâce à elle, nous étions coupés des allées latérales. Depuis que nous habitions cette ville, c’était devenu notre coin. Et à chaque fois que nous visitions le parc, nous nous réfugions toujours dans la toison de l’arbre, à l’abri des autres.

Miranda + Hannibal

L’inscription trônait parmi les autres, perdue au milieu d’une foule de petits mots, de tags, de dessins. Je l’avais griffonnée sur une latte de bois qui rentrait à présent dans mon dos. En fait, il y avait longtemps que j’avais marqué le banc à notre nom. Et malgré les années, il était toujours resté. En vérité, j n’avais jamais perdu mes goûts d’adolescente alors que je m’amusais à tracer des petits cœurs ou à écrire sur les troncs des arbres. Durant notre cavale, j’avais sculpté nos initiales à travers le monde, dans tous les motels, dans toutes les stations services. Et je ne m’étais pas arrêtée avec l’âge. Aussi, je poussais un petit soupir alors que mes omoplates frottaient contre la gravure. Je la sentais. Doucement, Hannibal se dégagea alors. Et, visage tout proche, il me contempla en silence. Il aurait pu me toucher du bout du nez s’il s’était penché davantage. Il ne manquait qu’un millimètre. Mais il gardait un peu de recul pour m’admirer. Pourtant, je n’étais pas très jolie avec mes joues cerclées de rouge, comme une matriochka. A nouveau, ses lèvres me frôlèrent. Et nous échangeâmes nos souffles dans un gros nuage blanc. Nous partagions même notre buée, créant une fumée qui cachait nos amours.

Nos doigts s’entremêlèrent, perdus dans des pattes de laine. Nous portions de gros gants qui rappelaient des moufles d’enfants pour survivre à l’hiver. Et, pour s’amuser, mon frère joua à nouer et dénouer nos paumes. A présent, il me recouvrait à moitié. Mon dos était enfoncé dans les lattes de bois verts alors qu’il était couché sur moi, m’écrasant entre son torse et le dossier. Mais je ne m’en plaignais pas. En fait, j’avais l’impression qu’un bouclier se dressait entre moi et la tempête. En effet, au ciel, des petits flocons tournoyaient encore. Et peu à peu, ils s’ajoutaient aux strates blanches qui étouffaient déjà le parc. Il était déjà tombé un bon mètre de neige. Et malgré l’effort des cantonniers, les allées et les routes n’avaient pu être complètement dégagées. C’était une année glaciale. Tous les deux jours, la poudreuse revenait, tombant entre les immeubles comme du sucre glace. Et j’aimais ces fleurs de coton, ouvrant déjà la bouche pour en avaler une, ou deux, ou trois. Je jouais comme un petit chiot. Et mon frère éclata de rire alors qu’il chassait les pellicules prises dans mes cheveux.

-Je vais devoir partir.

-Non ! Pas tout de suite ! Pas maintenant !

C’était la troisième -ou la quatrième fois que nous répétions cette échange. Aussi, mon frère secoua la tête avec une sorte de résignation mêlée d’amusement. Depuis une bonne heure, je refusais qu’il parte. Et je m’accrochais à lui comme une petite sangsue, incapable d’accepter qu’il me quitte, qu’il s’évapore dans l’hiver. D’ailleurs, j’avais refusé qu’il me raccompagne à l’appartement. Et depuis un moment, nous occupions notre banc préféré, entourés des paquets que nous avions achetés. En effet, nous avions profité de notre matinée pour terminer nos courses de Noël. Les fêtes approchaient et se profilaient à grands pas, comme une ombre joyeuse. Aussi, je ne me tenais plus en place, trop impatiente. J’avais toujours adoré les célébrations, la famille, les cadeaux. Et du matin au soir, je fredonnais des chants traditionnels alors que j’exhumais de vieilles recettes de cuisine. En plus, à présent, tout notre appartement croulait sous les décorations. Avec ma grande fille, nous avions accroché boules, étoiles et couronnes jusqu’au plafond.

Mon frère me jeta un regard un peu désemparé. Il ne pouvait plus reculer davantage son départ, alors qu’il avait déjà fait une lourde entorse à son emploi du temps. En effet, il devait rencontrer un dernier client avec les fêtes -un ami du sénateur qui l’exploitait et qui sollicitait son aide. Ce devait être son dernier contrat. En effet, Hannibal n’avait pas oublié sa promesse, ni nos projets d’exil en Argentine. Cette année promettait d’être belle, peut-être la plus belle de nos vies. D’ailleurs, je prévoyais aussi mon retrait du monde de la mode, qui m’indifférait de plus en plus. Et sur le banc, je lui lançais un regard dépité, toute triste. On aurait dit une pauvre petite biche aux abois. Et très vite, mes mains s’agrippèrent au col de son manteau pour le retenir. Pourtant, il ne devait pas partir bien longtemps. Il s’agissait seulement d’un rendez-vous dans le petit salon d’un palace, à quelques rues de notre immeuble. Mon frère serait rentré pour le dîner. Mais après notre matinée, je n’avais pas envie de rester seule alors que nous avions couru les boutiques ensemble. Je n’étais pas un petit animal fait pour la solitude. Je n’aimais que les contacts, les câlins, la chaleur d’un autre corps. Aussi, je me lovais sur son épaule, mes ongles toujours plantés dans sa parka. Il n’allait pas se débarrasser de moi facilement.

-Tu es sûre que tu ne vas pas que je te raccompagne à la maison ? Tu ne pourras pas porter tous ces paquets toute seule.

Je haussais les épaules, boudeuse. De toute manière, je n’avais pas le cœur à penser à tous ces détails techniques qui me barbouillaient la tête. Pourtant, mon frère n’avait pas tort. Nous avions dévalisé les magasins pour terminer nos achats de Noël. En effet, après les cadeaux des filles et de la famille, que nous avions accumulés la semaine dernière, nous avions acheté des présents pour nos amis. Il avait fallu trouver une attention pour chacun. Et j’avais même dressé une petite liste d’idées avec laquelle je m’étais promenée dans tous les rayons, ravie par le décor des boutiques et les vitrines enchanteresses où s’activaient des automates et des lutins. Katie et son mari, Joachim et son fils, Ian et Rodriguez, Dany et son futur bébé, Natascha, Sam et son grand-père. Nous n’avions oublié personne ! Et à présent, il ne nous restait plus qu’à penser aux petites attentions, pour les personnes que nous croisions parfois et qui comptaient quand même. Mais ce n’était guère à l’ordre du jour. En effet, après plusieurs heures dans les grandes surface, chez les antiquaires ou les bijoutiers, nous avions déclaré forfait. Et nous avions terminé la matinée dans un restaurant avant de hanter le parc de nos baisers.

A présent, je devais rentrer à la maison, dix paquets sous chaque bras. Mais ma petite moue tremblotait alors que je secouais vivement la tête. J’envoyais voler de grandes mèches châtains de droite à gauche, tristounette. Mon frère coinça alors mon menton dans une de ses mains -en fait, il écrasait tout mon visage dans une de ses paumes. Et cela me donnait des allures de mérou qui lui arrachèrent un sourire. Doucement, il déposa un dernier baiser sur ma bouche de poisson.

-Je vais appeler un taxi, même pour quelques rues. Il t’attendra à la sortie du parc.

-Tu ne peux pas rester encore dix minutes ?

-Non, il faut vraiment que j’y aille.

-Et cinq minutes ?

-Non, ma belle, non.

-Deux minutes, alors ?

Hannibal secoua la tête, bien embarrassé alors que je marchandais. Mes yeux éplorés remplissaient mon visage comme deux grosses flaques d’eau. En même temps, je ne pouvais pas lui en vouloir. Il m’avait déjà donné cinq minutes, et encore cinq minutes... jusqu’à former une heure. Ou plus ! A présent, son client devait follement s’impatienter, même s’il l’avait prévenu d’un retard. Aussi, mon frère quitta enfin le banc, se déployant avec peine alors que je le tenais toujours par les mains. J’avais caché mes petites menottes dans ses paumes, trouvant abri dans ses poings couverts de laine. Je m’y sentais si bien ! Il rejeta ses épaules en arrière alors que ses os émettaient un petit craquement -nous étions restés recroquevillés sur l’autre très longtemps. Et il étira ses jambes, secouant même ses bottes pour chasser la neige qui s’accumulait déjà. Alors, avec galanterie, il baisa mes mains l’une après l’autre. Je souris. Puis ce fut le vide. Je venais de perdre son contact alors qu’il reculait déjà d’un pas. Un après-midi, ce n’était pas très long. Mais je n’avais plus envie de perdre mon temps loin de lui, surtout après la promesse d’une autre vie. En effet, je rêvais de plus en plus à ce qui nous attendait après, en Amérique du Sud. Et avec mon frère, nous en parlions souvent dans notre chambre, étendus dans notre lit quand toutes les lumières étaient éteintes. Quand la ville dormait, nos cœurs battaient plus fort.

Mon frère esquissa un pas, puis un autre. Mais il ne me tournait toujours pas le dos, me faisant face en dépit des plaques de verglas qui parsemaient son chemin. Il ne semblait toujours pas prêt à quitter mon image. En fait, il me dévorait toujours du regard, comme s’il gravait mon image pour plus tard, dans d’autres rues, avec d’autres gens. J’agitais alors la main en l’air, comme une gamine. On aurait dit que je donnais de petits coups de griffe dans le vide, pareil à un chat qui gratte l’air. Hannibal me répondit en secouant la main. Et sa bouche crachait de la buée alors qu’il murmurait mon nom. Il n’avait pas plus envie de partir que moi. Mais il y eût d’autres pas tandis qu’il quittait la sphère réduite de notre banc, qu’il s’avançait dans l’allée... du moins à reculons ! En fait, il n’était pas question pour lui de me tourner le dos. Nos yeux s’accrochaient toujours -et mon regard commençait à pétiller alors que je comprenais. Il n’allait pas rompre le lien. Il allait m’emporter avec lui aussi longtemps, aussi loin que possible. Mon cœur sauta dans ma poitrine alors qu’il était à présent à une dizaine de mètres.

Au-dessus de nous, les flocons tombaient toujours en rafale. Ils tourbillonnaient comme des perles avant de grossir en silence les nappes blêmes du parc. C’était un spectacle magique. Et la neige se prenait dans les cheveux de mon frère, comme du diamant. Son manteau était également recouvert de talc tandis que son écharpe claquait au vent, secouée par la bise. Pourtant, il n’avait pas froid -il s’était trop longtemps réchauffé à mon corps, à ma flamme. Je posais alors une main sur mes lèvres. Et je lui envoyais un baiser, aussi remuée qu’amusée. Nous avions toujours idées folles pour ne pas quitter l’autre -ou pour moins le quitter. Et à présent, je regardais mon frère qui marchait à l’envers parmi les rares promeneurs. Il ne voyait rien au spectacle qui se passait derrière lui tandis qu’il glissait à l’aveuglette, fidèle à mon sourire, à mes yeux pétillants. A un moment, je crus que sa botte dérapait sur du givre. Puisqu’il ne pouvait rien prévoir, il risquait l’accident. Mais il se rattrapa très vite, se stabilisant en écartant les bras, comme un patineur qui frôle la chute. Je pouffais alors de rire comme une petite fille.

Il était maintenant au milieu de l’allée. Autour de lui, les gens s’agitaient, tournaient la tête pour le toiser. Ils trouvaient son comportement bizarre. Pourquoi marcher à l’envers ? Par ce temps ?!Certains lui jetaient des regards noirs alors qu’il les embarrassait. Il ne faisait pas attention où il allait et il risquait de cogner quelqu’un à tout moment. D’ailleurs, à une ou deux reprises, des promeneurs s’écartèrent pour éviter la collision. Un homme retint même un chapelet de gros mots tandis qu’il dardait un regard en coin à mon frère. Mais parce qu’Hannibal était beaucoup plus grand, beaucoup plus fort et impressionnant, il se contenta de ravaler ses injures. Et il accéléra le pas à ses risques et ses périls, jusqu’à disparaître dans une autre allée, près des pelouses blanchies. En même temps, Hannibal ne prêtait attention à rien. Et il faisait abstraction des badauds. Ce n’était que des silhouettes qui nageaient près de lui, des ombres en eaux troubles. Seul mon corps, assis sur le banc, se détachait du décor, couleurs sur noir et blanc. Et il ne regardait que ma petite main qui s’agitait toujours, de plus en plus faiblement. Il n’entendait que ma petite voix qui lui disait au revoir.

Dans le lointain, il agita les bras au-dessus de sa tête, m’adressant de grands signes qui me tirèrent un éclat de rire. On aurait dit un aiguilleur ! Et, pour ne pas le perdre de vue, je me dressais sur les genoux. En fait, j’étais toujours campée sur le banc. Mais je plantais mes jambes dans le bois, comme un petit héron, alors que je me tordais le cou pour ne pas perdre une miette de son départ. On aurait dit un périscope. Et je décrochais à moitié ma tête alors qu’il apparaissait et disparaissait entre les formes emmitouflées. Surtout, je continuais à pouffer, amusée. Il reculait toujours dans la neige, il tournait toujours le dos aux autres -comme s’il nageait à contre-courant. Et ma main s’agitait frénétiquement pour l’accompagner. Je sentais encore ses yeux qui me détaillaient, qui m’enregistraient. De mon côté, je ne cessais pas de sourire. J’avais vissé mes lèvres à mes pommettes pour qu’il emporte cette belle image, même si j’étais dépitée. Sous le vent, mes cheveux s’envolèrent tandis que mon bonnet glissait. Et on entendit le froissement de mes paquets qui gémissaient à côté, dans du papier kraft. A présent, je ne voyais plus qu’un bout de mon frère. A sa manière, il avait enfin -et trop vite- atteint le bout de l’allée. Et son visage se détachait du gris morne de la ville, comme un halo pâle, magnifique. Je gravais aussi cette image. Son sourire. Sa main. Et...

Il avait disparu.

Je clignais des yeux, déçue. Et je restais encore quelques secondes à scruter la foule. Alors, lentement, je me rassis sans déplier mes jambes. Au contraire, je collais mes fesses sur mes talons, dans une position d’enfant, perdue au milieu des achats. Il était parti... mais en retard, à reculons. Et toujours avec moi.

Miranda.

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