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Le Journal de Miranda
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Le Journal de Miranda
21 décembre 2010

La Fin

Je me sens très émue. En effet, j’ai décidé d’arrêter mon petit journal. Cette envie n’est pas survenue d’un seul coup : je la mûris depuis plusieurs semaines. Mais pour l’heure, je n’avais encore jamais eu le courage de la mettre à exécution. En fait, j’ai un rapport très particulier à ce carnet où je note toute ma vie. Je l’adore ! Il est devenu ma mémoire, mes souvenirs, mes journées, mes pensées... il a tout recueilli dans son encre. Et surtout mon amour. Mon amour pour lui. Chaque jour, je courrais pour l’écrire et je m’en faisais une joie. D’ailleurs, il n’a jamais été contrainte. Je ne me suis jamais sentie acculée par son écriture. J’ai toujours voulu noter mes mots, j’ai toujours aimé ça. J’adorais raconter mes dernières péripéties ou mon quotidien avec Hannibal. Je revivais tous ces moments... et surtout, je les préservais pour plus tard. Je suis sûre que dans quelques années, je serais ravie de retrouver ce journal. Je relierai avec émotion tous ces jours et ces nuits avec lui. Que pensera la vieille dame que je serais de la jeune fille que j’ai été ? Sera-t-elle fière ? Me trouvera-t-elle naïve ou belle ? Se reconnaîtra-t-elle ?

Si j’avais pu, j’aurais continuer ce journal pour toujours. Je l’aurais écris chaque jour de ma vie jusqu’à la fin. Mais j’ai toujours su que cette belle aventure prendrait fin. En effet, écrire quotidiennement cinq ou six pages n’est pas une mince affaire ! Il était parfois difficile de trouver un créneau, deux heures pour griffonner. D’ailleurs, on peut vraiment dire que j’ai écris dans tous les endroits du monde. J’ai tapé à mon ordinateur dans un avion, sur une plage des Tropiques, dans un chalet au Canada ou un ranch australien, dans une voiture qui roulait vers New-York, dans un train en Russie ou dans les coulisses d’un défilé parisien. Ce journal a vu le monde entier. Et pour lui, j’ai toujours trouvé le moyen de m’isoler. Je me cachais dans un coin et j’écrivais. Parfois, j’étais interrompue. Parfois, je reportais d’une heure à cause d’un rendez-vous... mais je n’ai jamais lâché ! Même s’il fallait terminer en pleine nuit !

Mais aujourd’hui, ma vie me rattrape. J’ai un métier qui me prend beaucoup de temps. Je suis mannequin, même si ce n’est plus pour longtemps. Je suis styliste pour de la lingerie et je crée des cosmétiques. Je suis investie dans plusieurs associations de défense pour la planète et les animaux. J’ai également des amis que j’adore, comme Joachim et Arthur, Katie et Helmut, Sam et Dany, Natascha et Ian... Il y a ensuite ma famille, mon père, ma belle-mère, ma grand-mère et mémé. Sans parler de mes deux petites filles adorées, qui me demandent tant d’attentions au quotidien. Et bien-sûr, j’ai gardé le meilleur, le plus important pour la fin : il y a Hannibal. Mon amour, mon frère adoré. Celui pour qui j’ai écris ce journal. Il a d’ailleurs été très patient au cours des derniers mois pour me permettre d’écrire. Il savait que cette tâche comptait et il ne se plaignait jamais lorsque je perdais deux heures dans mon coin pour mes textes.

Quand j’ai commencé ce journal, je ne savais pas encore jusqu’où j’irais. Au départ, j’avais prévu d’écrire pendant une année. Cela me semblait suffisant pour raconter tout ce que j’avais à dire. Je voulais coucher sur le papier ma vie extraordinaire. Car elle l’a été ! Car elle l’est encore ! Et surtout, je voulais parler de cet amour sans fond, sans fin, qui me lie à mon frère. C’est pour lui et par lui que tout a commencé -comme le reste, comme ma vie. Il fallait que je nous dise. Je voulais raconter notre première rencontre sur le parvis d’une église, notre amour dans le désert, notre cavale, notre fuite, notre séparation... Mes souvenirs ont irrigué toutes ces pages. Malheureusement, je n’ai pas eu le temps terminer. J’ai été dépassée par l’ampleur de la tâche ! Je n’ai pu qu’atteindre le moment où nous nous retrouvons enfin, à la sortie de prison. Mais c’était l’essentiel. Je ne pouvais pas mettre un point final à ce journal sans avoir été réunie avec mon frère !

Pourtant, il me reste encore quelques souvenirs à partager : notamment le retour à la vie d’Hannibal, dans le désert de notre enfance. Ou notre mariage à Sainte-Hélène. Toutes ces choses qui nous ont construites, nous et notre couple. Pour cette raison, je sais que je reviendrais dans ce journal. Je terminerais ce que j’ai commencé. Mais pas maintenant. Je n’en ai plus le temps et je me sens un peu fatiguée. C’est justement pour ça que j’arrête maintenant : ce journal devait rester un plaisir. Et il l’a été ! Tellement ! Mais dans quelques mois, peut-être années, je reviendrais pour parler de tout ça. Je raconterais aussi tout ce que j’ai vécu entre temps -notamment notre déménagement en Argentine, notre nouvelle vie. Je sais déjà qu’elle sera longue et belle. Et je la partagerais aussi dans ces pages. J’attends simplement de retrouver un peu de feu. Et de poursuivre ma vie avec lui. En plus, beaucoup de choses vont changer dans les mois à venir. Je ne serais plus aussi disponible... mais ça me fera une grosse réserve de souvenirs !

Un an et sept mois ! C’est finalement le temps que j’ai tenu derrière mon écran. J’ai dépassé de sept mois mes espérances. Et j’ai d’ailleurs été étonnée par ma persévérance. Mais j’ai toujours été une grosse bavarde, une vraie petite pipelette ! J’ai aussi beaucoup changé durant cette période. J’ai commencé comme une jeune fille de 23 ans, mariée avec une petite fille, seule avec son grand frère et mari... et j’ai terminé avec une autre petite fille, après une réconciliation avec mon père et ma famille. J’étais aussi un simple mannequin au début. Et demain, je m’apprête à abandonner ma carrière pour me consacrer à l’élevage des chevaux en Amérique du Sud ! Tout peut changer, même en 19 mois ! Et puis, avec moi, il y a toujours des rebondissements, on ne s’ennuie jamais. Aussi, il ne faut pas être triste. Il ne faut pas pleurer ! Je vais être très heureuse avec lui, comme je l’ai toujours été. En même temps, il y aura toujours un « avant » et un « après » ce journal. Il m’aura beaucoup marqué. Mais on ne peut rien me souhaiter de plus que ce que j’ai déjà. Ma vie est si belle...

Et puis, ce journal a rempli sa petite mission : il m’a fait vivre avec mon frère. Il a d’abord montré qui j’étais, qui nous étions. Je n’ai rien caché de mon caractère, de mes bêtises, de ma naïveté, de mon entrain... J’ai tout partagé -même ma chambre à coucher ! J’ai levé le voile sur toute ma vie. Je crois que je ne m’étais jamais autant livrée, sinon à mon grand frère ! Et aujourd’hui, à l’heure de la fin, tout se mélange. Toutes ces journées magiques : la patinoire, la danse sur l’eau, les cotillons, l’éclipse, la baignoire dans le désert, les plumes, la poussière, les papillons, les roses blanches... toute notre magie ! Hannibal m’a tellement aimée. Il est en moi. Et cela transpirait dans chaque ligne. Je continuerais à vivre ces heures bleues loin de mon journal... mais il n’y en aura plus de trace, sinon dans ma tête... dans mon cœur... dans son cœur...

Maintenant, il est temps de dire « au revoir ».

Mais pas adieu.

Je vais fermer les yeux.

Je vais compter jusqu’à trois, et je ne serais plus là...


Un...

Deux...

Trois...

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